Camille : La blessure de Rejet

Rejeter pour ne pas être rejeter !

Je vous présente Manon, la trentaine, très engagée dans son église locale, maman de deux enfants, un garçon de 4 ans et un bébé de 10 mois. Manon a également une vie professionnelle dense.

Ce matin-là, en début de culte, Manon ne salue pas Camille. Elle ne l’a d’ailleurs même pas vue. Ni elle, ni personne d’autre. Elle est fatiguée, et ne souhaite qu’une seule chose, pouvoir s’asseoir quelque part et se poser. Manon a passé une très mauvaise nuit. Son bébé a beaucoup pleuré, les dents…. Elle a donc peu dormi. Et la semaine a été très compliquée. Par ailleurs, en cette fin d’année, de nombreux bilans sont à rendre, et elle a pris un peu de retard dans son travail. Elle est tellement fatiguée qu’il lui était pénible d’aller au culte ce matin-là !

Mais, elle s’était motivée !

Mais, durant le temps de trajet, son fils aîné avait pleuré parce qu’elle n’avait pas voulu qu’il mette son short vert… En plein hiver quand même !

C’est donc, fatiguée et passablement agacée par ses enfants que Manon est arrivée au culte ce matin-là. Et, dans cet état, sa principale préoccupation était de s’asseoir et de faire silence en elle, au regard de tout ce qui s’était passé le matin et, la semaine, etc. Retrouver un certain calme afin de pouvoir se mettre devant Dieu.

Camille a aussi la trentaine. Elle est célibataire et sans enfant. Elle a un travail dans lequel elle s’épanouie peu, mais qui lui permet de vivre. Elle aussi est très engagée dans l’église.

L’une et l’autre s’apprécient beaucoup. Mais elles se connaissent depuis peu. Autant Manon est extravertie et à l’aise dans les relations, autant Camille est introvertie, discrète, voire invisible.

Voilà la situation dans son ensemble. Camille apprécie beaucoup Manon. Elle a vraiment beaucoup d’amitié pour elle. Et inversement…

Mais Camille souffre également depuis sa plus tendre enfance d’un fort sentiment de rejet dont elle n’a pas conscience. En général, elle fuit les relations, car, dans le passé, elle a été très souvent déçue. Elle n’est d’ailleurs pas très à l’aise avec les autres, ne sachant pas toujours comment alimenter une discussion.

Ce rejet est lié à son histoire personnelle, à son enfance et aux renforcements négatifs de cette histoire tout au long de sa vie. Cadette d’une fratrie de 4 enfants, elle n’a pas été désirée par sa maman, qui lui a d’ailleurs très souvent reproché sa naissance.

« Sans elle, elle aurait certainement repris un travail et aurait eu une vie plus épanouissante. »

 De plus, selon sa mère, Camille n’était pas une enfant facile. C’est d’ailleurs pour cela, que très tôt, elle l’a mise en garderie, puis  plus tard , en accueil de loisirs tous les jours et le plus longtemps possible, alors qu’elle même était à la maison. « Pour avoir la paix! »

C’est à cette époque que remonte les premiers souvenirs de rejet de Camille. A la maison, sa mère ne jouait jamais avec elle, ne la câlinais que très peu. Souvent Camille se sentait de trop, seule. Elle se faisait alors petite, invisible pour qu’on l’oublie, pour se protéger aussi.

« Si on ne me voit pas, on ne voit pas ce que j’attends, alors, c’est comme si je ne voyais pas non plus ce que j’attends puisque c’était aussi invisible que moi. Donc, en fait, je n’attends rien « .

Tels étaient les pensées inconscientes mais  bien réelles de Camille. Des pensées profondément ancrées en elle.

Sa mère n’est d’ailleurs ni affectueuse avec elle, ni encourageante, bien au contraire, elle est distante. Elle est sensible à la réussite professionnelle de ses autres enfants, à la réussite de leur vie de famille. Mais elle n’est pas fière de Camille. Pour elle, Camille n’a encore rien réalisé d’important, ni belle carrière, ni mari, ni enfant !

Ce matin-là, Camille était donc particulièrement fragile. Elle se sentait très seule, isolée, rejetée.

Peut-être aussi parce que le projet qu’elle avait présenté à son patron cette semaine, dans lequel elle avait mis tant de cœur, et qui a pourtant été validé et apprécié par la direction, l’avait un peu laissé sur sa faim. Selon elle, il n’avait pas suscité l’enthousiasme qu’elle avait imaginé en le préparant. Elle était, en fait, assez déçue.

Elle avait tellement besoin de reconnaissance et besoin d’être reconnue dans ce qu’elle faisait !

D’ailleurs, elle ramène très souvent sa valeur à ce qu’elle fait et non à ce qu’elle est.

C’est avec cette déception et le besoin d’être réconfortée qu’elle avait appelé sa mère la veille de cedimanche. Elle était venue rechercher auprès d’elle, une reconnaissance pour ce travail. Or, sa mère, une fois de plus, avait balayé d’un revers de main l’attention qu’elle réclamait. C’était un projet comme tant d’autres après tout !   Et puis, lui avait-elle dit, « tu n’es plus une enfant !»

Voilà l’état d’esprit de Camille ce matin-là. Et c’est à ce moment-là que Manon, passe devant elle sans lui dire bonjour.

Ce simple fait va réactiver la blessure de rejet déjà mise à vif durant la semaine. D’un coup, elle ne se sent plus assez bien pour Manon.

Et, c’est là que tous les scénarios intériorisés de rejet se mettent en marchent.

« Eh oui, c’est normal, j’ai raté ma vie. Je ne suis pas comme Manon. J’ai 30 ans, je suis seule. Je ne suis pas mariée. Je n’ai pas d’enfant. Mon métier est inintéressant par rapport à celui de Manon. Je suis moi-même inintéressante. Je comprends qu’elle en ai marre de moi. Je finis de toute façon par décevoir tout le monde. En même temps, elle n’a pas à me traiter comme cela ! Ce n’est pas très charitable de sa part, pas très « chrétien » ! Je ne vais pas subir cela ! En fait, elle ne m’apprécie pas, elle a pitié de moi ! Je n’en ai que faire de sa pitié… ».

Et voilà que s’installe un discours intérieur et des scénarios non fondés sur la réalité, mais uniquement sur cette blessure de rejet qui vient lui donner une autre lecture de la situation.

Et c’est ainsi que Camille, vexée de ne pas avoir été saluée par Manon, et ne voulant pas faire un premier pas en retour, va s’installer à l’autre bout de la salle, non loin de la porte. Elle pourra rapidement partir à la fin du culte ! Fuir !

D’ailleurs, ce jour-là, elle n’écoutera rien du message. Elle restera hermétique à tout, enfermée dans sa blessure et les pensées de rumination qui l’accompagneront. Centrée sur cette blessure dont elle n’a pas vraiment conscience. Cette pensée galopante va peu à peu envahir tout son esprit, elle va se sentir rejetée par le monde entier, et, sans changement de sa part, sans guérison, elle va finir également par se sentir rejetée par Dieu.

Voilà très souvent comment l’ennemi de nos âmes utilise nos blessures pour diviser, isoler et créer des conflits, jusqu’à parfois perdre notre relation avec notre Seigneur.

Voilà comment Camille n’a pas vu la réalité de la scène telle qu’elle était, mais l’a vu et analysée à travers ses lunettes déformantes. Ce jour-là, elle n’a même pas vu que Manon avait aussi besoin de réconfort et d’aide car fatiguée elle aussi. Elle n’a pas vu qu’elles pouvaient se soutenir, s’épauler…

Piquée au vif, au contraire, elle en a déduit que Camille ne l’appréciait finalement pas. Alors son comportement sera de rejeter Manon et de la fuir.

Il faut savoir que, lorsqu’on qu’une personne souffre d’une blessure de rejet, elle devient elle-même rejetante afin d’éviter ce qu’elle craint, le rejet. Et, dans l’incapacité à se retrouver devant un possible rejet, la fuite est la tactique la plus souvent employée, celle-ci incluant de couper toute relation dans laquelle elle pourrait être rejetée.

Depuis, Camille évite Manon, ne lui adresse que peu la parole. La relation est rompue et la belle amitié naissante tuée dans l’œuf.

Camille d’ailleurs finit par trouver Manon prétentieuse, hautaine et rejetante.

Manon ne comprend pas l’attitude de Camille. Mais il lui est difficile de l’approcher tant Camille est fuyante. Elle n’arrive pas à avoir d’explication. Camille est même parfois agressive.

Il faudra l’intervention d’une tierce personne et un travail de Camille sur sa blessure du rejet, pour qu’elle se rende compte de son erreur et demande pardon à Manon. Manon lui pardonnera et ensemble elles décideront de reconstruire une nouvelle relation. Camille poursuit son travail sur sa blessure de rejet, dont les ramifications peuvent être longues et prendre plusieurs aspects, mais elle a appris à les reconnaître, à les donner à notre Seigneur qui est mort pour toutes nos blessures et qui est celui qui console les cœurs brisés. Elle a déjà vécu une restauration pleine de sa relation avec lui, relation première à être entachée par cette blessure. Elle a appris à lui faire confiance, car il est celui qui ayant connu le rejet, l’ayant emmené avec lui à la croix, tend des bras grands ouverts pour nous en libérer. Nous avons cette ferme assurance.

Camille a particulièrement fait sien ce verset « Celui qui écoute, m’écoute, et celui qui vous rejette me rejette, et celui qui me rejette, rejette celui qui m’a envoyé » (Luc 10:16, version LSG). Elle a fait sien ce verset, socle de son adoption par notre Seigneur. Et c’est à partir de là qu’elle a pris conscience à quel point elle était aimée, pris de l’assurance, et n’a plus laissé ses pensées de rejet, issues de cette blessure primaire, prendre le contrôle sur ses relations.

Au fur et à mesure de sa vie, elles se font moins présentes. Camille goûte maintenant la joie d’entrer en relation avec les autres. Et, quand il lui arrive encore parfois d’être débordée, consciente (et donc humble) de cette faiblesse en elle, elle commence par demander à notre Seigneur de lui montrer et de l’aider.

Dans le prochain article, je vous présenterai « Yolanda l’abandonnée ».

Nathalie AZRAK

« Celui qui écoute, m’écoute, et celui qui vous rejette me rejette, et celui qui me rejette, rejette celui qui m’a envoyé »

(Luc 10:16, version LSG).

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